jeudi 23 août 2012

"Visa pour Shangaï" de Qiu Xiaolong

"Washington doit ramener la femme d'un passeur chinois, condition exigée par ce dernier pour qu'il témoigne dans un procès contre l'immigration clandestine. Pékin veut sauver la face et le camarade inspecteur Chen, appelé à l'aide par le Parti, doit servir d'interprète et de guide a Catherine Rohn, l'inspectrice américaine envoyée sur place. Mais voilà, la femme du passeur disparaît, et Chen n'entend pas non plus lâcher une affaire en cours pour les beaux yeux du FBI..."

 Mon premier est une enquête que l'inspecteur Chen mène d'une main de maître.
Mon deuxième est une plongée dans la Chine des années 90 et dans son histoire : révolution culturelle, envoi des jeunes instruis à la campagne, et nouvelles évolutions de la société.
Mon troisième est l'écriture agréable et poétique de Qiu Xiaolong.

Mon tout est un très agréable moment de lecture saupoudré de proverbes chinois.

"Un homme est prêt à sacrifier sa vie pour celui qui l'apprécie, et une femme se fait belle pour celui qui l'apprécie."
"La vie est comme l'empreinte laissée par une grue solitaire dans la neige. On la voit un instant, puis elle disparaît."
"Une longue nuit donne le temps de faire beaucoup de rêves."

"La lettre de Conrad" de Fred Uhlman

"Parce qu'il a participé à un complot contre Hitler, Conrad est condamné à mort. À la veille de son exécution, il décide d'écrire une longue lettre à l'ami juif qu'il se reproche d'avoir trahi."

 Suite de L'ami retrouvé, La lettre de Conrad est un court récit sous forme de lettre écrite par Conrad pour Hans, son ami d'enfance. Conrad est un jeune aristocrate allemand, Hans est juif. Malgré une amitié très importante pour l'un et l'autre, la guerre aura raison de leur relation.
La lettre de Conrad montre comment la jeunesse allemande s'est laissée embrigader dans le nazisme.
L'image de la mère à une place très importante dans ce récit et finalement, Conrad n'a agit que par besoin d'amour maternel et de reconnaissance.

" Pourriez-vous cesser s'il vous plait d'appeler mon ami le "petit Moïse". Cela me blesse énormément. Je vous en prie, essayez de comprendre que c'est mon ami, Juif ou pas."

"L'axe du loup" de Sylvain Tesson

"Sylvain Tesson a refait le long voyage de la Sibérie au golfe du Bengale qu'effectuaient naguère les évadés du goulag. Pour rendre hommage à ceux dont la soif de liberté a triomphé des obstacles les plus grands, seul, il a franchi les taïgas, la steppe mongole, le désert de Gobi, les Hauts Plateaux tibétains, la chaîne himalayenne, la forêt humide jusqu'à la montagne de Darjeeling. A pied, à cheval, à vélo, sur six mille kilomètres, il a connu le froid, la faim, la solitude extrême. La splendeur de la haute Asie l'a récompensé, comme les mots d'une ancienne déportée : "On a le droit de se souvenir.""

 Sylvain Tesson est écrivain et journaliste, mais aussi globe-trotteur. Il met son art de l'écriture au profit de ses longs voyages à travers le monde.
L'axe du loup l'emmène de la Sibérie à l'Inde sur les pas des évadés du Goulag. Au delà du voyage, Sylvain Tesson nous documente beaucoup sur l'histoire des pays traversés. 

C'est un voyage incroyable où il a pu apprécier la beauté de nombreux paysages là où bien d'autres avant lui sont passés en quête de liberté.
 "La force de l'évadé tient dans le fait qu'il n'a rien à perdre et que chaque pas le rapproche de la mort ou de la délivrance, ce qui signifie, dans les deux cas, d'une situation préférable à l'enfer qu'il laisse derrière lui."

 Le style est parfois un peu compliqué. J'avais déjà lu "On a roulé sur la Terre", récit de son voyage avec Alexandre Poussin et j'avais bien plus facilement accroché le récit.

jeudi 16 août 2012

"Tendez-nous la main" de Abdel Belmokadem

« Avec ce livre, je veux montrer qu’on peut renoncer à la fatalité, ne pas vivre sa différence comme une injustice, mais comme une force et un point d’appui. J’ai eu la chance de rencontrer sur ma route des personnes d’autres milieux sociaux, qui ont cru en moi et m’ont aidé à grandir. Mon histoire est la démonstration que tout est possible, à condition de le vouloir et d’oser faire un pas vers l’autre. Ce livre est un message d’espoir mais aussi une alerte : aujourd’hui, les quartiers sont étrangement calmes. Jamais la situation des jeunes n’y a été aussi dure. Il est urgent de leur tendre la main. »

 J'ai reçu ce livre, avec un peu de retard, dans le cadre de Masse Critique du mois de mai sur Babelio. Je l'ai terminé juste avant l'annonce de la création des "zones de sécurité prioritaires" et du déclenchement des émeutes d'Amiens... Un livre plus que d'actualité donc...

 Abdel Belmokadem est né et a grandit à Vaux-en-Velin, dans la banlieue lyonnaise. Très vite il cherche à se démarquer des autres et grâce à sa rage de vaincre, il progresse dans le monde de la boxe, ce qui lui permet de sortir un peu de son quartier.
Le jour où il devient enfin boxeur professionnel, il décide de tout arrêter. Il galère d'un boulot à un autre quand se déclenchent les émeutes de 1990. Avec quelques potes, il sillonne le quartier et tente de faire revenir le calme. La mairie du Vaux-en-Velin lui offre, en 1993, le premier poste de médiateur. 
Après plusieurs années sur ce poste, il crée sa propre entreprise "nes&cité", qui vient en aide aux jeunes des quartiers dans toutes les zones urbaines sensibles. Il met sa démarche et son expérience au service des Communes ou des entreprises qui le sollicitent.

Le constat d'Abdel Belmokadem est celui-ci :
"Le fait de grandir à l'intérieur d'un quartier pendant quinze ou vingt ans crée des cloisonnement dans la tête. Du coup, quand tu as vingt ans et que tu dois aller à la mission locale ou au Pôle Emploi, qui se trouve dans le centre-ville, à cinq minutes en bus, c'est un expédition. En plus c'est un territoire que tu ne connais pas, dont tu ne maîtrise pas les codes. Mentalement, ça suffit pour faire barrage."

 Pour lui, le solution ne viendra pas d'un renforcement policier mais bien d'un accompagnement des jeunes, parfois individuellement, vers l'emploi.
Adepte de jeux d'échec, il avance ses pions un à un dans les quartiers grâce au sport, à l'emploi et aux différents médiateurs qu'il forme. Sa connaissance de la vie de quartier et du fonctionnement des groupes lui permet d'isoler les "suiveurs" pour les réinsérer et ensuite approcher les leaders.
Il amène les jeunes vers l'emploi mais sans leur fournir clé en main. Il facilite les rencontres avec les entreprises grâce à ses opérations "Jobs et cité" mais il ne peut pas passer l'entretien à leur place, à eux de savoir se vendre. Il les entraîne parfois comme pour un match de boxe.
"Si ça n'a pas marché, si t'es pas content, c'est qu'il y a un problème. Il faut l'identifier. Pour une partie, le problème vient peut-être de nous, mais pour une autre, il vient sans doute de toi. Sur notre partie, je veux bien qu'on regarde, mais sur la tienne, j'aimerais aussi qu'on en parle. Tu n'y arriveras que si tu te poses la question."

Chef d'entreprise, élu municipal, il reste surtout un homme de terrain qui va vers les jeunes, vers les élus et les entreprises, pour créer du lien et faire tomber les préjugés.
Vu le contexte des derniers jours, ce livre devrait être mis entre les mains de tous nos dirigeants nationaux et locaux. Pour ma part, je vais le laisser trainer un peu sur mon bureau à la mairie!

"Si je tends la main aux jeunes des quartiers, c'est parce que beaucoup l'ont fait avec moi. De Philippe Oddou à Saïd, tous m'ont éduqué, dans le bon sens du terme : ils m'ont passé le témoin. Moi, je tends la main à quelqu'un d'autre, je lui passe le témoin, et si on fait ça de main en main, de quartier en quartier, de génération en génération, on finira par gagner la partie."

Merci à Babelio, aux éditions Anne Carrière et à nes & cité.
Merci à Abdel Belmokadem de partager son expérience.

mercredi 15 août 2012

Mes lectures des vacances!

Pour mes vacances, je voulais emmener dans mes valises, des livres pour rire. Besoin de décompresser!
 D'où mon premier choix :

 "L'accro du shopping attend un bébé" de Sophie Kinsella.
" L'accro du shopping a le plaisir de vous annoncer la naissance de...
Becky est aux anges ! Dans quelques mois, elle donnera naissance au plus adorable, au plus magnifique, au plus looké des bébés.

D'ici là, elle s'évertue à mettre en pratique sa toute nouvelle théorie : le shopping soignerait les nausées matinales.
Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si notre accro ne s'était pas mise en tête d'être suivie par l'accoucheuse des stars, la sublime Venetia Carter... qui n'est autre que l'ex-petite amie de son mari, Luke ! Et qui semble bien décidée à le redevenir...
Entre les deux femmes, la guerre est déclarée. La pauvre Becky survivra-t-elle aux humiliations de la vénéneuse Venetia ? Quand la situation semble désespérée, notre fashionista a plus d'un tour dans ses sacs !
"

 C'est léger, c'est frais et c'est rigolo!! Voilà de quoi passer un bon moment de détente...rien de mieux pour démarrer les vacances et enfin déconnecter son esprit du boulot et de la maison.
Installez vous tranquillement sur votre chaise longue et laissez vous emporter par la tornade Becky.
Pas besoin d'avoir lu les autres avant, on comprend tout de suite le personnage!
 

En arrivant à l'accueil de la bibliothèque, des petits paquets surprises attendaient les audacieux...j'en ai choisi un, titré "rire", et voici ce que j'ai découvert!

"Dieu est un pote à moi" de Cyril Massarotto.

"L'un a une barbe de quelques jours, l'autre de millions d'années.
L'un vit sur terre, l'autre dans les nuages.
L'un est vendeur dans un sex-shop, l'autre a un métier qui réclame le don d'ubiquité.
L'un n'a pas beaucoup d'amis, l'autre aimerait parfois se faire oublier d'eux...
Vous ne voyez toujours pas de qui il s'agit ?
Et si Dieu avait décidé de faire de vous son meilleur ami ?
"

 Pas de suspens dans ce livre, on voit tout de suite où cela va nous mener mais Cyril Massarotto le fait avec beaucoup d'humour et de subtilité. Les passages plus difficiles sont habillement amenés, sans faire dans le patos. 
Je n'ai pas été gênée par le côté religieux. L'auteur ne fait pas de propagande, il donne son point de vue sur Dieu et nous laisse adhérer ou non.
Un livre qui ne peut pas laisser indifférent et qui pousse forcément à la réflexion.

" Il y a des questions auxquelles on ne peut pas répondre. Et tu sais pourquoi? Parce qu’il ne faut tout simplement pas se les poser, dans la mesure où elles n’ont aucun sens. C’est la même chose pour toi. Tu trouves étrange d’être heureux de ce que tu as, de ne pas vouloir plus, et tu te demandes si c’est normal? Est-ce que tu te rends compte du saugrenu de ta réflexion? Ce que je veux te faire comprendre, c’est qu’il faut juste vivre, prendre les choses comme elles viennent. Le bonheur n’est pas un projet. Sois-en bien conscient. Vis, et ne t’encombre pas l’esprit de questions inutile."

"La Douce Empoisonneuse" de Arto Paasilinna.
Linnea, la veuve du colonel Ravaska, mène une existence tranquille dans sa petite métairie, à arroser ses violettes, en compagnie de son chat. Mais ce paisible tableau n'est qu'une façade... tous les mois, la bonne vieille tremble de peur ! En effet, son neveu et ses deux compères viennent la dépouiller de sa pension, jusqu'au jour où il demande à figurer sur son testament...

D'une situation, à priori, désespérée pour cette vieille dame harcelée par son neveu, Paasilinna va créer un vrai jeu burlesque.
On s'amuse à suivre les péripéties de ces personnages tous plus malmenés les uns que les autres.

Un livre à prendre au second degré mais qui nous montre tout de même le côté sombre de la société Finlandaise et notamment de sa jeunesse.

Complètement immoral mais drôle!!

"Aux urnes, les ploucs!" de Charles Williams.
L'oncle Sagamore régale ! C'est qu'il est en campagne électorale. Tout est bon pour être tranquille, y compris d'être élu puisque c'est nécessaire pour magouiller en paix. Créatures de rêve, alcool, promesses... Non content d'avoir rendu fou le shérif du coin, Sagamore va une nouvelle fois marquer de son exceptionnelle patte le comté de Blossom. De mémoire de concitoyens, on n'avait jamais rien vu d'aussi formidable. Tout le pays en a parlé ! Les gens qui se tiraient dessus... Le gouvernement qui menaçait d'envoyer la garde nationale... En fin de compte, ça faisait une telle pagaille que personne ne savait plus qui faisait campagne pour qui, ni pourquoi. Quelle importance ? Une petite arnaque, une pression, un coup bas... Le pays connaît ça. Il l'a prouvé depuis.

Le jeune Billy vit dans la ferme de son oncle Sagamore et s'il ne comprend pas tout des activités de son oncle, il sait que tout n'est pas très honnête vis à vis de la loi. En période électorale, cela peut poser problème, notamment quand les deux candidats à l’élection mise tout sur son arrestation.
C'est un florilège de personnages haut en couleur que Charles Williams nous propose dans ce livre. Impossible de ne pas se prendre à leur jeu. On se met dans la peau du shérif et on tente de démêler les ruses de Sagamore avant lui.
Un bon moment de lecture. Drôle et futé!


La mission des vacances est donc remplie, j'ai beaucoup ri !! 
Merci la bibliothèque!

jeudi 9 août 2012

"Sous la tonnelle" de Hyam Yared

"Pour garder vive la mémoire de sa grand-mère tout juste disparue, la narratrice se réfugie dans son boudoir, où se sont entassés au fil des ans lettres, dessins et carnets. La fantaisie, la liberté et la générosité de la vieille dame qui pendant toute la guerre du Liban a refusé, malgré les objurgations de sa famille, de quitter sa maison et son jardin, situés sur la ligne de démarcation entre Beyrouth Est et Beyrouth Ouest, s’y retrouvent tout entières. Veuve à trente et un ans, cette encore jeune femme, d’origine arménienne, avait décidé de consacrer sa vie aux autres, après avoir juré fidélité à son défunt mari. Pour sa petite-fille, en instance de divorce, déchirée entre sa quête de liberté et son besoin d’amour, elle était à la fois un point d’ancrage et un modèle inatteignable. Au fil du roman va pourtant apparaître, derrière la figure idéalisée, une femme plus complexe et plus mystérieuse aussi. S’arrachant à son isolement, la narratrice finit par rejoindre dans le salon les visiteurs venus présenter leurs condoléances, ceux qu’elle appelle les « corbeaux ». Elle y croise un inconnu, dépité d’être arrivé trop tard pour remettre à l’occupante des lieux l’épais dossier qu’il lui destinait. Pendant une longue conversation sous la tonnelle, la narratrice médusée va découvrir tout un pan caché de l’existence de sa lumineuse grand-mère."

 Un roman comme je les aime. Hyam Yared nous parle de sa grand-mère, nous promène dans le Liban des années 30 à nos jours, tout en restant ouverte sur le reste du monde et les grands évènements de cette période.
 Dans un style simple, chargé d'émotions, elle nous présente cette femme qui a tant compté pour elle. Une femme qui a voulu résister à la guerre et rester neutre dans tous les conflits. On ressent son attachement, son respect pour elle. 
Avec l'arrivée d'Eugène, elle va découvrir un nouveau visage de sa grand-mère, une histoire qu'elle a gardé pour elle seule : son amitié amoureuse avec Youssef, son exigence envers elle-même et sa fidélité à son premier amour.

Un magnifique portrait de femme. 
Un bel hommage à un petit pays bousculé tout au long de l'Histoire.
Une œuvre poétique.

J'ai beaucoup aimé l'écriture de Hyam Yared. On ressent ses sentiments et on s'attache aux personnages. J'avais l'impression d'être assise avec elle sous la tonnelle du jardin de sa grand-mère.

"Beyrouth Est. Beyrouth Ouest. Ta maison juste au milieu. Dans une zone fantôme désertée par les habitants."

"Druzes, maronites, juifs, chiites, sunnites, avaient tous trouvé refuge dans les monts de ce pays aussi généreux que les hanches d'Irina. Malgré toutes les bêtises et les manipulations de l'Histoire, ce pays avait toujours tenu sur ses pieds et sa pluralité."

"Le cœur ne se dit pas, il se chuchote, sans presque de voix, disais-tu. C'est un murmure de lèvres d'où aucun son ne sort et où tout est possible."

"Au fond de l'oeil du chat" de Serge Quadruppani

"Paul est tué au moment où il devait rencontrer son fils de vingt ans qu'il n'avait jamais connu. Michel, quinquagénaire chômeur et rêveur, ironique et doux, n'avait que deux points d'amarrage dans la vie : Paul, son ami d'enfance, et Jupon, sa chatte bien-aimée. Et ces points d'ancrage disparus, tandis que des flics tueurs tentent de l'éliminer, que d'autres flics, dont un colosse homosexuel et une capitaine dont il est amoureux, tentent de le sauver, Michel commence à dériver..."           

Voici un petit polar qui ne paie pas de mine mais qui permet de passer un bon moment. Pas de grande nouveauté dans l'écriture et l'intrigue mais le tout se tient donc on se prend au jeu.

Le récit alterne entre deux personnages :
- Michel, quinquagénaire à la dérive, se retrouve tour à tour, suspect, inspecteur et héros.
- Emile, ancien agent des guerres secrètes, nous emmène dans ses occupations macabres.
Les animaux, les chats en particuliers, ont bien sûr leur place dans ce récit.

Serge Quadruppani encre l'intrigue dans des faits réels et actuels. Il n'hésite pas à pointer du doigt le fonctionnement de certains services de l'Etat.

"Au moment du coucher, même Manga, le seul être vivant que je laisse accéder à l'étage, n'a pas le droit de franchir le seuil de ma chambre.
Je ne me déshabille jamais sous le regard des chats.

Ce qu'il y a dans l'oeil de ces animaux de compagnie, de ces félins entrés en douce dans la vie des humains voilà quelques millénaires, je ne l'ai jamais vu ailleurs."

vendredi 15 juin 2012

"Stiletto Blues à Hollywood" de Lauren Weisberger

"Dur de vivre dans l'anonymat, pour un artiste ! Les cachets modestes, les dates intermittentes... Mais parmi ces convois de musiciens rêveurs, New York cachait une perle. Julian Alter vient de signer son premier album : coup d'essai, coup de maître. On se l'arrache. Paparazzi, concerts en pagaille, Julian est propulsé au top. Côté flop, Brooke, sa femme, rafle la mise. Du jour au lendemain, la jolie rouquine doit jongler avec les groupies et la presse à scandale. Et ça, c'est beaucoup moins rock..."

Voilà un livre léger, dans l'air du temps, qui détend et change les idées.
Brook est un peu madame tout le monde, on entre vite dans sa vie, on s'identifie facilement à elle. Elle en profite alors pour nous embarquer dans son monde, plutôt tranquille au départ, puis dans le tourbillon du succès de son mari.
J'ai commencé à le lire en me disant ça va te distraire, ça fait pas de mal! Et je me suis fait totalement happer par Brook.

Une histoire très réaliste. On est content de voir enfin le succès arriver, on est stressé quand Julian monte sur scène, on vérifie les fenêtres pour être sûr qu'il n'y a pas de paparazzis en face, on s'attend à trouver une photo de Brook et Julian en passant devant le marchand de journaux, on est à leurs côtés dans les moments difficiles... Bref, on vit avec eux!!

Et ce qui rend Brook si humaine c'est qu'elle a beau être diététicienne, quand elle n'a pas le moral, elle se jette sur un pot d'Haagen Dazs!!

Fortement recommandé pour sortir de son train-train et filer à Hollywood...

Petite dédicace à Nathalie Jomard, l'illustratrice de la couverture, dont je suis le Grumeauland avec délectation.

"Les choses de la vie" de Paul Guimard

"Lorsque la traverse de la barrière du champ défonce la portière, elle atteint le conducteur au sommet du crâne qu'elle scalpe sans entamer les os. À l'instant du choc contre le pommier, le corps désarticulé est projeté à travers l'ouverture béante du pare-brise qui le lacère. Il frôle les basses branches de l'arbre, boule sur le sol en pente et ne s'arrête que loin de la voiture en flammes."

Que se passe-t-il dans notre tête après un accident?
C'est ce qu'essaie de nous montrer Paul Guimard dans ce livre court mais intense.
L'avocat Pierre Delhomeau est en route pour Rennes. La musique, les odeurs, font rebondir ses pensées de souvenirs en souvenirs. Dans le virage du lieu-dit la Providence, un camion arrive en sens inverse et une bétaillère tente de traverser la nationale...
Paul Guimard nous décrit alors l'accident avec beaucoup de détails. Cet enchaînement qui conduit à l'inévitable.
"Il ne s'est pas écoulé dix secondes depuis le moment où, sous le soleil mouillé, la MG roulant à 140 à l'heure a abordé le large virage du lieu-dit la Providence."

On suit ensuite l'avocat dans son cheminement mental, de la recherche d'indices sur son état physique, aux souvenirs de sa vie (la guerre, les premiers amours, etc). Quelques passages racontés par un tiers nous informent des suites de l'accident : les bouchons sur la route, l'arrivée des gendarmes, le voyage en ambulance, l'arrivée à l’hôpital, etc. Mais la plus grande partie du récit concerne ses pensées à l'approche de la mort.
Un dernier espoir de survie le fera imaginer une renaissance.

"Il sait désormais que chaque seconde peut être le dernière. Tout le monde le sait mais une fois pour toutes. Lui, au contraire, ne cesse de le savoir et là réside la différence. Il tire de cette proposition une vérité dynamique et une morale."

"A nous deux nous entraînerons Hélène à aimer la vie comme les morts savent le faire."

Ce livre écrit en 1967, nous parle des premiers accidents dus à la vitesse... 45 ans après, nous ne sommes toujours pas débarrassé de ce fléau...

Le petit plus qui m'a bien plu : les souvenirs d'enfance, les premiers émois des grandes vacances...
"Le rythme scolaire impose aux enfants des ruptures que les adultes ne supporteraient pas."

dimanche 20 mai 2012

"Je veux rentrer" de Tassadit Imache

"A trente-trois ans, Sara travaille dans un service d’aide sociale et a accepté une mission qui a de faux airs de week-end à la mer : accompagner deux enfants qui doivent prendre possession des effets de leur mère, tragiquement disparue. Mais rien ne se passe comme prévu et Sara se retrouve avec deux orphelins méfiants, errant dans un cimetière à la recherche de la tombe d’une certaine Patricia Loiseau, ancienne fugueuse de la cité des Coquelicots. Le destin d’une autre, décide Sara, qui depuis son retour à Paris vacille. A-t-elle jamais cessé d’être une fille de la cité des Bleuets ? Suffit-il d’habiter un immeuble en pierre de taille entre les murs de la capitale pour tirer un trait sur ses origines et son histoire ?
Dans ce roman d’une jeune femme en fuite, Tassadit Imache, loin des discours convenus sur le métissage et la fracture sociale, pose de troublantes questions sur la manière dont chacun cherche à se construire une identité acceptable — au prix de quels mensonges, de quelles impostures ? —, quitte à inventer ses repères et ses désirs dans une société en perte de liens."
 
 Un petit livre prit un peu au hasard sur une étagère de la bibliothèque...et qui me laisse un peu perplexe... 

Toute en finesse, Tassadit Imache nous emmène dans le périple de Sara avec ces 2 enfants qu'elle ne connaît pas, pour récupérer les derniers effets d'une mère qui les a abandonnés. Le parcours des enfants raisonnent chez Sara qui perd rapidement pied et se tourne vers ses propres "démons" : une mère qu'elle n'a pas vu depuis 2 ans, sa véritable identité, ses origines...

Un roman sur les drames familiaux au sein des banlieues des années 80-90, sur le manque de repères identitaires de ces jeunes adultes qui cherchent à sortir des Bleuets ou des Coquelicots pour se fondre dans la masse, sur la perte des liens familiaux.

"On dit que tout le monde transporte son enfance avec soi. Qu'un jour ou l'autre, ça sert, pour traverser la vie. Pourvu qu'on ait des souvenirs auxquels se raccrocher. Quand ça ne va pas, essayer de se rappeler un ou deux bons épisodes. Le jour où ma mère a dit ça. La nuit où mon père a dit ça. Le mieux, quand vraiment ça n'allait pas, aurait été de passer chez ses parents. De se coucher un moment aux creux de son lit d'enfant. On rêverait peut-être d'une autre vie. Sauf qu'il n'y a plus de "chez nous" fixé quelque part ni de gens sur qui compter."

Bref, un sujet intéressant raconté par une personne qui  le connaît puisque Tassadit Imache travaille dans un service d'aide social.

Je n'ai toutefois pas réussi à entrer dans le livre. L'écriture m'a déroutée. Le style est haché, parfois sans ponctuation ou alors une ponctuation mal placée. C'est assez étrange, peut-être un effet de style pour rendre compte du parcours haché de ses personnages... Pour moi, c'est devenu un calvaire et pourtant le livre ne fait que 140 pages. J'ai souvent du relire des passages car je m'étais perdue en route...

Dommage...

"La Grande Rafle du Vel d'Hiv" de Claude Lévy et Paul Tillard

"27 388 fiches ont été préparées par les soins des services préposés aux questions juives. Le 16 juillet 1942, à l'aube, près de 9 000 hommes des forces de l'ordre de Vichy déclenchent l'une des plus grandes opérations policières menées dans Paris depuis l'arrestation des Templiers et la Saint-Barthélemy : Ce jour-là et le lendemain, 12 884 juifs, étrangers ou d'origine étrangère, vont être arrêtés. On compte parmi eux 4 051 enfants, dont beaucoup sont français. On expédie directement en Allemagne ou en Pologne, via Drancy, les célibataires et les couples sans enfants.
Les familles avec enfants sont concentrées au Vel d'Hiv : plus de 7 000 personnes vont demeurer prisonnières sous cette immense verrière, dans une chaleur effroyable, presque sans eau. Parmi elles, les 4 051 enfants. Cela s'appelait l'opération Vent printanier. Ceux qui ont été arrêtés sont amenés aux camps de Drancy, Pithiviers, Beaune-la-Rolande. De là, ils partent pour Auschwitz où est appliquée la « Solution Finale».
"

Ce livre est un documentaire sur cette journée du 16 juillet 1942. Un recueil de témoignages de juifs raflés mais aussi d'autres acteurs liés à l'évènement. Il ne s'agit pas de documents mis bout à bout. Paul Tillard et Claude Lévy s'attachent vraiment à raconter cette journée, l'organisation qui l'a précédée, et les déportations qui ont suivi...

J'avais noté ce livre sur ma liste après avoir vu La Rafle et à la lecture de ces documents, on se rend compte que le film est vraiment très fidèle à la réalité...
Les auteurs insistent plus précisément sur  le rôle des policiers français dans cette journée et, documents à l'appui, mettent en lumière les responsabilités du gouvernement de Vichy. Notamment, les prises de positions de Pierre Laval face aux allemands. C'est à lui seul que l'on doit la déportation des 4051 enfants, aucun n'est revenu.

Claude Lévy et Paul Tillard consacrent également un chapitre aux positions des différentes religions en France. Quand l’Église protestante alerte rapidement ses disciples et les autorités sur les décisions prises par le gouvernement de Vichy, l’Église catholique, elle, reste muette...même le Pape... Ce n'est que bien après la Rafle que les premiers Évêques vont réagir.

Cet évènement a beau être connu de tous aujourd'hui, la lecture de ce livre nous met un peu plus face à l'horreur de cette période. Le Vel d'Hiv, les trains, les camps sont décris dans le moindre détail par les survivants, les médecins, les infirmières...

Un document pour ne pas oublier...

"Quoi qu'il en soit les Juifs seront déportés en wagons de marchandises, empilés à 90, parfois à 120 par wagon..."

"Pour nous les paroles de La Marseillaise étaient réellement vraies. Vrai, l'étendard de la sanglante tyrannie, vrais, les soldats qui viennent jusque dans nos bras égorger nos fils et nos compagnes, sauf qu'aux soldats de l'infâme tyrannie se mêlaient les uniformes des miliciens et des hommes de Vichy."

"Quoi qu'il en soit, ce qui s'est passé s'est passé. Le bon comme le mauvais, et rien ne peut ni s'effacer ni s'oublier. Les traces en sont indélébiles."

Claude Lévy a fait parti de la Résistance pendant la guerre. Arrêté en décembre 1943, il fut livré aux Allemands et déporté en juillet 44.

Paul Tillard a également rejoint très tôt la Résistance. Il fut arrêté en août 42, livré à la Gestapo, il est envoyé comme otage au fort de Romainville et finalement déporté en avril 1943 au camp de Mauthausen en Autriche. Il a été le premier à publier son témoignage sur les camps nazis, dès son retour. Il a écrit de nombreux ouvrages. La Grande Rafle du Vel d'Hiv est le dernier. Il n'en verra pas la publication. Il est décédé le 27 juillet 1966, des suites de la déportation.

mardi 1 mai 2012

"Le prince de la brume" de Carlos Ruiz Zafon

"« Le Prince de la Brume n'avait jamais complètement disparu. Il était demeuré dans l'ombre en attendant, sans hâte, que quelque force occulte le ramène dans le monde des vivants. »
1943, Angleterre. Fuyant la guerre, la famille Carver – les parents et leurs trois enfants, Max, Alicia et Irene – se réfugie dans un village de bord de mer. Leur nouvelle maison appartenait précédemment à un riche couple qui a quitté le pays après la mort de leur petit garçon, Jacob. Peu après son emménagement, la famille Carver est confrontée à de troublants événements. La maison de la plage paraît hantée. Quelque chose ou quelqu'un rôde entre les murs. Max et Alicia commencent à enquêter sur les circonstances obscures de la mort de Jacob. Roland, un adolescent du village, les aide.
"

Un livre jeunesse où tout est réuni pour attirer les lecteurs adolescents : de jeunes aventuriers, des énigmes, des frissons...de peur et d'amour (les premiers amours!).

Une écriture agréable et un style fantastique proche du réel. On se laisse entrainer dans ces aventures au rythme des tempêtes jusqu'à un final sombre et terrifiant!

Un court récit pour retrouver pendant 2 heures son âme d'adolescent. 

"Certaines images de l'enfance restent gravées dans l'album de l'esprit comme des photographies, comme des scènes aux quelles, quel que soit le temps écoulé, on revient toujours et que l'on oublie jamais."

"Le jardin d'Hadji Baba" de Isabelle Delloye

"Une ode grave et intimiste à l’Afghanistan.

Figure de la sagesse et de la culture persane, Hadji

Baba est un très vieil homme Afghan. Reclus dans sa villa à
Kaboul, il passe les dernières années de sa vie à enseigner son précieux savoir au petit orphelin qu’il a recueilli, Djon Ali. A sa mort, le jeune homme quitte le pays pour l’Occident, désireux de s’instruire davantage mais aussi dans l’espoir de trouver une vie plus facile. Un long périple initiatique commence alors pour Djon Ali.
"

Le jardin d'Hadji Baba, c'est avant tout un regard plein d'amour et de poésie sur un pays, l’Afghanistan.

Les enfants d'Hadji Baba sont partis vivre à l'étranger pour trouver un avenir meilleur et essayer d'aider leur pays. En leur absence, il recueille un jeune Afghan qu'il va élever comme son fils, dont il sera même plus proche que son propre fils. Il lui apprend son pays et le monde à travers les livres.

Dans la deuxième partie, après la mort d'Hadji Baba, Djon Ali souhaite découvrir réellement le monde et confronter son éducation à la vie. Aider par les enfants d'Hadji Baba, il va parcourir le monde et devenir un photographe reconnu, mais déchiré entre ses racines et le monde occidental.

Au delà du regard porté sur l'Afghanistan, ce livre parle aussi des relations parents/enfants/petits-enfants, bouleversées par la guerre. C'est après la mort d'Hadji Baba que ses enfants vont le comprendre et le mieux en parler alors que sa petite-fille Mina était très proche de lui et des ses racines.

Le jardin d'Hadji Baba est une confrontation des regards de différentes générations sur un seul et même pays.
Une écriture simple et poétique pour une histoire lourde. Un vrai coup de cœur.

"Un long dimanche de fiançailles" de Sébastien Japrisot

"Janvier 1917.
Cinq soldats français condamnés à mort en conseil de guerre, aux bras liés dans le dos. Toute une nuit et tout un jour, ils ont tenté de survivre. Le plus jeune était un Bleuet, il n'avait pas vingt ans. A l'autre bout de la France, Mathilde, vingt ans elle aussi, plus désarmée que quiconque, aimait le Bleuet d'un amour à l'épreuve de tout. La paix venue, elle va se battre pour connaître la vérité et le retrouver, mort ou vivant, dans le labyrinthe où elle l'a perdu.
Tout au long de ce qu'on appellera plus tard les années folles, quand le jazz aura couvert le roulement des tambours, ses recherches seront ses fiançailles. Mathilde y sacrifiera ses jours, et malgré le temps, malgré les mensonges, elle ira jusqu'au bout de l'espoir insensé qui la porte. On découvre dans ce livre, obstinée et fragile à la fois, attachante, bouleversante, une Mathilde qui prendra place parmi les héroïnes les plus mémorables de l'univers romanesque.
"

Un résumé d'éditeur bien détaillé...il n'y a pas grand chose à dire de plus sur ce grand classique, sur cette quête éperdue de Mathilde pour retrouver Manex après la guerre.
Malgré tout ce qu'on lui raconte, elle continue de rechercher la vérité car "si Manex était mort, Mathilde le saurait."
J'ai passé un très bon moment avec cette belle histoire d'amour de "MMM". Un texte magnifique.

Pour terminer, j'ai re-regardé le film qui est vraiment très fidèle à quelques détails près.

Une œuvre poétique et pleine d'espoir.

"Sept ans d'aventures au Tibet" de Heinrich Harrer

"Trois évasions en Inde pendant la Seconde Guerre mondiale, deux traversées de l'Himalaya, une marche interminable sur les hauts plateaux désolés du Changtang... Cinq ans de séjour à Lhassa, la ville interdite, où Harrer devint le confident et le professeur de l'actuel Dalaï Lama, alors un adolescent. Une aventure, oui mais aussi une quête rédemptrice qui va faire de l'ancien moniteur autrichien de l'entre-deux-guerres, inscrit aux SS, le défenseur des peuples opprimés. A commencer par celui du Tibet, ce " Toit-du-Monde " où Harrer a trouvé son salut et qu'il considère comme sa vraie " terre natale ".

 Dans ce livre, adapté à l'écran bien des années plus tard, Heinrich Harrer raconte sept années qui ont bouleversé sa vie. Parti pour faire des repérages en vue de l'ascension du Nanga Parbat, l'expédition se retrouve bloquée sur le sol Indien lors de la déclaration de la seconde Guerre Mondiale. Ils sont rapidement fait prisonniers.
Avec beaucoup de détails, Heinrich Harrer raconte ses tentatives d'évasion puis, la longue traversée effectuée avec Aufschnaiter pour rejoindre le Tibet.
La deuxième partie du livre est consacrée aux 5 années qu'ils ont passé à Lhassa. Harrer y raconte les gens, la vie quotidienne et les coutumes de ce peuple qui vie loin de la modernisation du reste du monde. C'est surprenant de voir à quel point ils ont été intégrés à la population de la Cité Interdite alors que les Tibétains ont tout fait pour les chasser du pays.
Sa rencontre avec le Dalaï Lama est assez tardive contrairement à ce que je croyais. Elle n'en sera pas moins intense. Assoiffé de connaissances, le jeune moine n'aura de cesse de l'assaillir de questions sur le monde extérieur.

Harrer a écrit son livre peu de temps après son retour en Autriche. Il porte donc un regard sur son expérience et sur le peuple Tibétain.
Le film est assez fidèle mais il met également en évidence la transformation de l'homme, Heinrich Harrer, au contact de ce peuple. 

Un bon moment d'évasion sur le Toit du Monde.
 

mercredi 14 mars 2012

"Un heureux événement" de Eliette Abécassis

" Désormais ma vie ne m'appartenait plus. Je n'étais plus qu'un creux, un vide, un néant. Désormais, j'étais mère. "
E. A.

"Violent, sincère, impudique, le nouveau roman d'Eliette Abécassis brise les tabous sur la maternité, cet " heureux événement " qui n'est peut-être qu'une idéologie fabriquée de toutes pièces. Après Mon père et Clandestin, la romancière affirme un ton toujours plus personnel, où la fiction se mêle à une analyse subversive de la société."

 La bande annonce du film m'a attirée mais comme toujours avant de voir le film, je préfère lire le livre... J'ai regardé les critiques à droite à gauche et mon envie en a pris un coup...on peut dire que ce livre est loin de faire l'unanimité! J'ai fini par me lancer avec un peu d'appréhension!

Bilan à chaud : ce n'est pas si terrible que ça!!
Certes Eliette Abécassis ne prend pas de pincettes et il vaut mieux avoir déjà fait des enfants avant de la lire, sinon on risque de ne jamais en faire... Mais, elle a le courage de dire, sans tabou, que la grossesse n'est pas toujours un état de plénitude absolue et que l'arrivée d'un enfant n'est pas si facile à vivre que ça.

Il y a la grossesse et la transformation du corps qu'il faut savoir accepter.
Il y a la rencontre avec ce petit être et la découverte de cette dépendance "à vie". Eliette Abecassis déculpabilise les femmes pour qui l'instinct maternel n'est pas une évidence...
"Pourtant j'étais attachée à elle [...], ma petite : un lien solide s'était tissé entre nous. Cela n'avait rien à voir avec la passion amoureuse. C'était quelque chose de viscéral et d'évident, de naturel et d'originel. Quelque chose d'organique et d'indéracinable. Peut-être était-ce cela, l'amour ?"

Mais ce qui m'a surtout marquée c'est la relation homme/femme. Je pensais ce livre centré sur la relation mère/enfant mais je ne m'attendais pas à ce volet "couple" qui bien évidemment est intimement lié...
Ce qui arrive à ce couple en 10 mois m'a fait l'effet d'un film en accéléré de ce qui arrive à de nombreux couples en 10-15 ou 20 ans. On peut choisir la solution radicale de se séparer au bout de 10 mois quand on n'arrive pas à se retrouver, comme on peut s'accrocher pendant plusieurs années pour finir par craquer lorsque les enfants ont grandi... 
10 mois ou 20 ans, le couple doit s'accrocher face aux doutes, aux peurs et aux tourments qui accompagnent l'éducation d'un enfant.

"L'amour au début est ardent et passionnel, schizophrène et maniaco-dépressif comme le bébé, puis il grandit et il devient mûr, solide, réfléchi, il se pose, il s'élève alors, mais nous ne le savons pas, nous disons tout simplement qu'il cesse."

L'écriture est particulière, assez impersonnelle pour un sujet si personnel, et ne m'a pas permis de me sentir proche de Barbara. Je n'adhère pas à tout ce qu'elle dit mais je pense que de nombreuses femmes, plus qu'on ne le pense, sont confrontées à cette dépression après l'accouchement. Mais dans notre société, elles n'ont pas beaucoup de place pour s'exprimer. Il ne fait pas bon dire que l'on est malheureuse après cet "heureux événement"...
 Il est important d'en parler mais je ne suis pas sûre que ce livre puisse aider une femme traversant cette crise...il n'y a pas de solution, juste le partage d'un vécu...

vendredi 9 mars 2012

"Dans la mer il y a des crocodiles : l’histoire vraie d’Enaiatollah Akbari" par Fabio Geda

"Dix ans, ou peut-être onze. Enaiat ne connaît pas son âge, mais il sait déjà qu’il est condamné à mort. Être né hazara, une ethnie haïe en Afghanistan par les Pachtounes et les talibans, est son seul crime. Pour le protéger, sa mère l’abandonne de l’autre côté de la frontière, au Pakistan. Commence alors pour ce bonhomme «pas plus haut qu’une chèvre» un périple de cinq ans pour rejoindre l’Italie en passant par l’Iran, la Turquie et la Grèce. Louer ses services contre un bol de soupe, passer les frontières dissimulé dans le double-fond d’un camion, braver la mer en canot pneumatique, voilà son quotidien. Un quotidien où la débrouille le dispute à la peur, l’entraide à la brutalité. Mais comme tous ceux qui témoignent de l’insoutenable, c’est sans amertume, avec une tranquille objectivité et pas mal d’ironie, qu’il raconte les étapes de ce voyage insensé."

Enaiatollah Akbari nous raconte 5 ans de sa vie, 5 années de voyage, de peur, de souffrances mais aussi d'amitié et finalement le soulagement de l'arrivée, le début d'une nouvelle vie.

Le récit d'Enaiat est entrecoupé de petits dialogues entre lui et Fabio Geda où l'on sent la confiance qui s'est instaurée entre eux.
Fabio Geda n'a pas cherché à romancer le récit d'Enaiat. Il le raconte brut, avec ses mots, et respecte ses choix notamment lorsqu'Enaiat ne souhaite pas s'attarder sur des descriptions car pour lui "les faits sont importants. L'histoire est importante. Ce qui change ta vie, c'est ce qui t'arrive, pas les lieux ni les gens".

Ce livre ne peut pas laisser indifférent. Le courage et l'envie de vivre de ce petit garçon, malgré l'abandon et les dangers, forcent au respect.
"Il faut toujours avoir un désir devant soi, comme une carotte devant un âne, parce que c'est en essayant de satisfaire ses désirs qu'on trouve la force de se relever, il faut toujours avoir un rêve au-dessus de la tête, quel qu'il soit, alors, la vie vaudra la peine d'être vécue."

Un beau témoignage.

Entretien avec Enaiat et Fabio Geda sur le site des éditions Liana Levi.

Le parcours d'Enaiat :

"Le bonhomme de neige" de Jo Nesbo

"Les premiers flocons ont quelque chose de féerique. Ils rapprochent les couples dans la chaleur des veillées, étouffent les bruits, étirent les ombres et masquent les traces. Dans le jardin familial des Becker, un bonhomme de neige fait irruption, comme sorti de nulle part, sorte de croquemitaine blanc, ses grands yeux noirs braqués sur les fenêtres du salon. Le lendemain matin, la mère a disparu, ne laissant qu'une écharpe rose entourée au cou du bonhomme de neige... Trop de femmes en Norvège, depuis des années, n'ont plus donné signe de vie dès la première neige. Harry Hole reçoit une lettre qui lui annonce d'autres victimes. D'une sobriété étonnante, l'inspecteur va se retrouver confronté, pour la première fois de sa carrière, à un tueur en série agissant sur son territoire. L'enquête le conduira jusqu'au gouffre de la folie."

D'un coup, la bibliothèque de ma Commune a acheté tous les livres de Jo Nesbo...Ne le connaissant pas, je me suis laissée tenter! En grande amatrice de polars, je ne suis pas déçue par cet auteur norvégien.

L'enquête avance sur un rythme tranquille mais qui ne traine pas en longueur. 
Le thème et les meurtres sont assez originaux. 
Le personnage de l'enquêteur principal Harry Hole est, comme bien souvent, assez charismatique : un peu perdu entre son ex-petite amie et une bouteille d'alcool trop tentante.

Bref, un bon polar où tous les éléments sont réunis pour  nous emmener au fil de l'enquête jusqu'au dénouement final...que l'on voit un peu venir quand même!

J'ai passé un bon moment mais pour autant, Jo Nesbo ne propose rien de nouveau.

"Le champ de personne" de Daniel Picouly

"Le Mohican, onzième d'une famille de treize enfants, vit dans un petit pavillon de banlieue. Sa famille, grande tribu généreuse, est solidaire et la vie n'est jamais monotone pour le Mohican, entre le football (sa grande passion) et les dictées (sa terreur), entre rêves et rires. Le champ de personne est la chronique d'une journée comme les autres..."


Une histoire de famille racontée par un enfant de 10 ans, avec son propre langage.
Picouly nous emmène à travers les joies, les difficultés et les aventures de cette tribu, de son enfance.
Ce livre est un bel hommage à sa famille nombreuse et surtout à sa mère qui l'écoute raconter son récit, et le recadre de temps en temps car il faut bien le dire, il part souvent dans tous les sens!

"J'entends la voix de la m'am au fond de mon oreille. La droite, celle des histoires pour s'endormir. La m'am est toujours à mes côtés. Elle flotte dans les airs, ne dort jamais, vole, apparaît, disparaît, se glisse sous mes paupières, dans la poche de mon short, ou dans mon cartable. J'ai de la chance, j'ai une maman Peter Pan."

Un récit plein de fraicheur malgré les sujets lourds des années 50-60.
Un petit bémol tout de même. Je l'ai trouvé un peu long sur certains épisodes et il est difficile de s'accrocher à ce langage enfantin sur 450 pages...j'étais contente d'arriver au bout!

mardi 6 mars 2012

"L'invention de Hugo Cabret" de Brian Selznick

"Hugo Cabret est orphelin : son père, qui l’élevait, est mort dans l’incendie du musée où il était employé comme horloger. Ses seuls compagnons sont un automate trouvé dans les décombres du musée, sur lequel travaillait son père, et son oncle, un poivrot qui l’héberge dans les combles de la gare. Un jour, l’oncle disparaît. Hugo n’a d’autre solution que de se cacher et de poursuivre le travail de l’oncle (régler les horloges) en priant pour qu’on ne le découvre pas. Car il a un but : finir de réparer l’automate de son père."

 « Ne tournez pas la page trop vite ! Imaginez d'abord que vous êtes assis dans le noir, comme au cinéma avant le début d’un film…….. »

Voilà comment passer un bon moment et engloutir plus de 500 pages en une soirée!!

L'intérêt du livre réside bien sûr dans l'alternance des dessins et du texte. C'est très agréable et facilite la transformation du texte en images pour les enfants. N'ayant pas encore vu le film, je n'ai eu aucun mal à imaginer la mise en scène. Tout est fait pour nous plonger dans l'univers du cinéma.

L'histoire n'a rien à envier aux plus beaux contes pour enfants : le rêve, l'imaginaire, l'amitié et la magie. Tout ceci mêlé à des évènements réels sur l'histoire du cinéma. Les personnages sont attachants et ont tous un petit côté mystérieux.

"Tu sais, dans les machines, il n'y a pas de pièces en trop. Elles ont exactement le nombre et le type de pièces qui leur sont nécessaires. Alors, je me dis que, si l'univers entier est une machine, il y a bien une raison pour que je sois là. Et toi aussi, tu as une raison d'exister."

"Le temps peut vous jouer des tours de toutes sortes.
En un clin d’œil, des bébés apparaissent dans des landaus, des cercueils disparaissent dans la terre, des guerres sont gagnées et perdues, et, tels des papillons, les enfants se métamorphosent en adultes."

Un magnifique livre jeunesse que je recommande aux adultes car il est toujours bon de revivre des aventures d'enfants!
Un beau clin d’œil au cinéma. Pas étonnant que Martin Scorsese s'en soit emparé! Il me reste à voir le film et je garde le livre sous le coude pour mon fils d'ici un ou deux ans!

mercredi 15 février 2012

"Le Troisième Jour" de Chochana Boukhobza

"Deux violoncellistes arrivent de New York pour donner un concert à Jérusalem.
Tandis que la jeune Rachel retrouve sa famille et ses amis, Elisheva prend contact avec les deux hommes qui doivent l'aider à piéger un ancien nazi.
Les deux femmes n'ont que trois jours pour mener à bien leurs projets et atteindre les buts qu'elles se sont fixés : amour, justice et liberté."

Il y a longtemps que ce livre est dans ma liste et je remercie mille fois Babelio de m'avoir sélectionnée dans le cadre de Masse Critique.
Mon intuition ne m'avait pas trompée, ce livre est un petit bijou, un vrai coup de cœur!

L'écriture de Chochana Boukhobza est douce, chantante, lumineuse. En bon chef d'orchestre, elle a pesé chaque mot, chaque détail, rien n'est laissé au hasard pour nous offrir un magnifique concerto.
En ouvrant ce livre, préparez-vous à sentir la chaleur brulante de Jérusalem (même quand il fait -15 depuis une semaine!) et laissez-vous guider dans les ruelles de la Vieille Ville.
 
Avant tout, Chochana Boukhobza nous présente une ville où se croisent des parcours, des destins et des peuples.
"J'ai senti la peau douce de Jérusalem apparaître derrière les pierres blanches, puissantes et râpeuses des murailles. Une peau douce derrière l'os de la ville. Des centaines d'hommes sont morts pour ce sanctuaire. Des milliers de jeunes gens de vingt ans y ont été blessés. Mais rien n'a changé dans la cité. Incroyable paradoxe, territoire paradoxe d'une civilisation qui s'interdit de déplacer une pierre de la ville, mais qui accepte qu'on meure pour elle."

Les histoires de chaque personnage se mêlent à l'Histoire : 
- Rachel dont les parents ont quitté la Tunisie lorsqu'elle avait 6 mois. Le passage sur leur départ est poignant. 
- Elisheva qui a été sauvée des camps de la mort par sa musique et en garde un puissant désir de vengeance,
- Carlos, le juif marrane qui travaille avec le Vatican,
- Daniel qui travaille en secret pour retrouver les responsables des crimes commis contre les juifs.
Je ne vais pas tous les citer mais chacun prend sa place dans ce récit pour nous dévoiler les milles et une facettes d'Israël et des peuples qui la composent. Ils sont tous attachants. Leurs blessures, leurs amours, leurs espoirs sont très bien traduits et les rendent très réels.

Le Troisième Jour, c'est aussi le retour au pays de Rachel et Elisheva. La découverte d'une ville qui a changé en leur absence, les retrouvailles avec des amis qui ont appris à vivre sans elles.
"J'ai compris que mes amis formaient un cercle auquel je n'appartenais plus. J'en étais sortie depuis longtemps, et je m'étais refusé à l'admettre. Ils me toléraient encore, mais la distance entre eux et moi  ne cessait de se creuser. Un jour ma compagnie ne leur serait plus indispensable. Un jour, nous n'aurions plus rien à nous dire; nos modes de vie seraient totalement inconciliables."
C'est également le choc des cultures entre la jeune génération résolument tournée vers un mode de vie moderne,  et les traditions de leurs parents dont ils ont du mal à se départir.

Pendant les trois jours qu'elles vont passer sur leur Terre, elles vont chacune renouer avec leur passé. Rachel retrouve son grand amour brutalement interrompu lors de son départ à New York, pendant qu'Elisheva mène un projet plus sombre pour venger les Juifs disparus dans les camps.

Un livre tiraillé entre Histoire, racines, traditions, passions et modernité...mais brillamment écrit!

Merci encore à Babelio et aux éditions Folio pour ce partenariat.

dimanche 29 janvier 2012

"La délicatesse" de David Foenkinos

« François pensa : si elle commande un déca, je me lève et je m’en vais. C’est la boisson la moins conviviale qui soit. Un thé, ce n’est guère mieux. On sent qu’on va passer des dimanches après-midi à regarder la télévision. Ou pire : chez les beaux-parents. Finalement, il se dit qu’un jus ça serait bien. Oui, un jus, c’est sympathique. C’est convivial et pas trop agressif. On sent la fille douce et équilibrée. Mais quel jus ? Mieux vaut esquiver les grands classiques : évitons la pomme ou l’orange, trop vu. Il faut être un tout petit peu original, sans être toutefois excentrique. La papaye ou la goyave, ça fait peur. Le jus d’abricot, ça serait parfait. Si elle choisit ça, je l’épouse…
– Je vais prendre un jus… Un jus d’abricot, je crois, répondit Nathalie.
Il la regarda comme si elle était une effraction de la réalité. »

La délicatesse a obtenu dix prix littéraires et a été traduit dans plus de quinze langues. Il était temps que je le découvre !! En voyant la promo du film, j'ai eu envie de le lire et ma sœur me l'a offert à Noël...parfait!!

Je n'en dirai pas trop vu que tout a déjà été dit. D'après ce que j'ai lu ici ou là, je crois que soit on tombe sous le charme de Foenkinos et on adore, soit on trouve ça mièvre et on déteste.
Pour ma part j'ai beaucoup aimé ce petit livre tout simple, plein d'humour et de délicatesse...
Foenkinos traduit magnifiquement le parcours des sentiments dans la tristesse ou vers l'amour.
L'écriture est douce, subtile. Il ajoute quelques pointes d'humour savamment dosées et de nombreuses phrases d'une justesse étonnante.

"C'était à nouveau la valse des sourires. Étonnant comme parfois on prend des résolutions, on se dit que tout sera ainsi dorénavant, et il suffit d'un mouvement infime des lèvres pour casser l'assurance d'une certitude qui paraissait éternelle."

"Il savait qu'il existait des navettes entre l'île de la souffrance, celle de l'oubli, et celle, plus lointaine encore, de l'espoir."

"Chaque jour près d'elle avait été la conquête immense mais sournoise d'un véritable empire du cœur."

Un petit livre qui se lit vite pour pouvoir le relire plusieurs fois !
Je vais peut-être attendre un peu pour le film!

mercredi 25 janvier 2012

"C'est beau une ville la nuit" de Richard Bohringer

"C'est beau une ville la nuit n'est pas à proprement parler un roman autobiographique ni une simple biographie d'acteur, mais bien plutôt l'écriture d'une errance et d'une quête. " Une balade, l'œil et l'esprit grands ouverts au vif de la ville et au droit de la vie, une route de douleurs, de joies et finalement d'espérances. " Ce livre est un fragment d'itinéraire de l'homme Bohringer avant même que les écrans renvoient cette image d'une " gueule " de cinéma et que celle-ci s'impose par la forte présence d'un comédien dont les valeurs personnelles ne se réduisent pas à sa profession et au narcissisme qu'elle entretient. Ouvert aux autres et amoureux de l'amitié, Richard Bohringer, grand lecteur de Cendrars, de Kerouac ou de London, sait donc que la raison même de l'écrivain est de mythifier la réalité de la vie, de dire vrai même dans l'imaginaire puisque " la réalité dans tout cela, ce sont les faits, les gens non pas tels qu'ils sont mais tels qu'on les vit. C'est la règle du jeu. La seule avec laquelle il est acceptable de jouer "."

 Je me souviens, ado, avoir écouté la voix de Richard Bohringer, le soir, dans son émission de radio "C'est beau une ville la nuit". Quand j'écoutais cette voix si particulière, j'imaginais les souffrances, les tours et les détours d'une vie.
C'est tout ceci qu'il raconte dans son livre.
Ce n'est pas une autobiographie. Le récit est haché, il met des petits bouts de sa vie côte à côte sans lien particulier, si ce n'est l'amour et la souffrance... Il nous raconte la débâcle de sa vie après le départ de sa femme et ses premiers pas de père.
"Je cours vers toi ma fille. Tu dors dans mon lit. Dans mon grand lit bien bordé. Je cours vers toi. Pardonne-moi de t'avoir oubliée. Je cours vers toi ma vie".

Dans ce parcours difficile, il sème quelques bouts de souvenirs de son enfance sans parent (il a été élevé par sa grand-mère), des premières femmes et quelques portraits de personnes qui ont marqué sa vie.
"Quand tu souffres tu crois que tu es seul. Et quand tu es heureux tu donnes des conseils."

L'écriture est franche, brute. Il nous livre sans détour ses malaises et sa colère contre lui-même notamment dans le passage sur ses 5 ans d'héroïne. On voyage dans le parcours de cet écorché vif.
Pourtant, tout n'est pas noir, on entrevoit des petits bouts de bonheur, d'amour, et surtout l'espérance d'une vie meilleure.
"Vie je te veux. Je t'ai toujours voulue. J'avais pas le mode d'emploi. C'est pour ça que j'ai tant attendu. Pour te dire combien je t'aime. Comme si t'avais toujours eu ta place dans mon horizon. Mais comment faire pour t'aimer? Vraiment t'aimer."

Un livre fort, chargé de sentiments, qui permet de mieux comprendre l'acteur, l'homme et l'écrivain qu'il est devenu.
"Écrire relève de l’espérance. Tu mets la virgule là où tu veux que ça freine et le point là où tu veux que ça s'arrête. Quand tu veux laisser ton idée faire son chemin sans toi, tu rajoutes quelques points. Quand tu t'étonnes, tu peux t'exclamer, c'est pas obligé. Et puis le reste, tu laisses à ceux qui veulent tout expliquer.".

dimanche 8 janvier 2012

Hommage...

Mano Solo nous a quitté le 10 janvier 2010. Il nous a laissé beaucoup de chansons, des peintures, des poèmes, et un roman. Je l'ai lu pour la première fois à sa sortie en 1996 et je l'ai relu ce week-end pour pouvoir vous le présenter aujourd'hui...

"Dehors il pleuvait.
Joseph était là sur le plancher avec la même bave qu'hier. On devait être bien avancé dans l'après midi et avec ce temps de merde il faisait déjà presque nuit. Joseph ouvrit les yeux. C'était lui, Joseph dans ce monde pourri de merde, dans cette vie à la con. Joseph sous la pluie. Joseph la plaie. Joseph le fugitif. Le mort qui parle. Le mort qui ouvre un œil. Le mort, qui se lève. Le mal de tête du mort. Enfin tout comme d'ab, quoi.
"

Défoncé jour et nuit, Joseph remonte la rivière sur sa péniche mais le déluge le fait dériver et il finit par s'accrocher à des arbres. L'attente d'une accalmie sera pour lui une longue introspection.
On y retrouve tous les thèmes que Mano Solo aborde dans ses chansons : l'amour, la haine, le désir, la mort...son combat face à la maladie, la lutte entre désespoir et rage de vivre.
" Lui qui croyait ne plus aimer la vie, son instinct l'aimait pour lui.
"Je resterai accroché par les ongles à cette vie de merde. Par pur esprit de contradiction."
"Je te ferai bouffer tes rêves, jaloux de la chance que tu as d'en avoir encore."
"Il en voulait à la vie de cette maladie sur laquelle il n'avait aucun pouvoir et qui lui gâchait le meilleur de son existence."
"J'ai mis des bougies. Le jour de ma mort, je veux qu'on mette autant de bougies autour de moi que j'avais d'années, comme ça ma mère croira que c'est mon anniversaire."

Les femmes ont une place importante dans les textes de Mano. Sur ce bateau, deux images l'accompagnent : une grande histoire d'amour et un énorme sentiment de culpabilité.
"Je ne sais plus si j'ai le droit d'insister, de dire à cette fille viens, viens ma peau ne brûlera pas tes mains, de ma bouche ne coule pas le poison."

Tout au long de cette lecture, on a l'impression d'être dans sa tête. Il nous livre ses sentiments bruts, directement sortis de son cœur, de son âme. Les mots sont forts, crus. Mano nous bouscule, nous emporte avec lui dans sa dérive. 
"Tu es si vivant qu'on ne peut t'imaginer mort."

La longue dérive de Joseph sur cette rivière, dans son corps et dans son âme, se termine sur sa rage de vivre et sur l'espoir. Un long chemin pour se pardonner et être de nouveau en paix avec lui-même...jusqu'à la prochaine dérive...
"Il s'était jugé et condamné lui-même, il était temps de se libérer sur parole, de se réinsérer dans le monde des vivants."

Ce roman est tellement imprégné de lui que sa voix nous accompagne, et comme il le disait si bien dans sa chanson Je suis venu vous voir... "tant que quelqu'un écoutera ma voix, je serai vivant dans votre monde à la con".

En ce jour anniversaire, je retiendrai tout particulièrement cette phrase :
"Ce jour-là mon âme entière remplira le monde."

J'ai découvert Mano Solo sur le plateau de Nulle Part Ailleurs en 1995 lors de la sortie de son deuxième album "Les années sombres". Il m'a toujours accompagnée depuis... J'ai eu la chance de le voir deux fois en concert dont la dernière dans la petite salle de spectacle de ma ville natale. C'était un pur moment avec un Mano fatigué par la tournée mais qui donnait sans compter. J'en garde un souvenir poignant et un beau dessin. Merci Mano pour tes chansons et ta présence.


En ce début d'année, les éditions Points Seuil publie un recueil comprenant ce roman, mais également les poèmes de son autre livre "Je suis là", ainsi qu'une cinquantaine de pages de dessins. Tous les bénéfices de la vente de ce livre seront reversés à l'association humanitaire, chère à Mano, Fazasoma qui œuvre pour lutter contre le paupérisme à Madagascar.





Et bien sûr je vais terminer en musique avec un vibrant hommage de ses potes des Têtes Raides. La qualité de la vidéo n'est pas terrible mais j'ai eu la chance de le vivre en direct au Zénith de Saint-Etienne, c'était magnifique...

"Adieu mes amis ,
je m'srai bien battu encore ,
adieu mes amours ,
priez pour moi..."

Il nous manque son Shalala...

vendredi 6 janvier 2012

"En un monde parfait" de Laura Kasischke

"Jiselle, trentenaire et toujours célibataire, croit vivre un véritable conte de fées lorsque Mark Dorn, un superbe pilote veuf et père de trois enfants, la demande en mariage. Sa proposition paraît tellement idyllique qu’elle accepte aussitôt, quittant les tracasseries de sa vie d’hôtesse de l’air pour celle, a priori plus apaisante, de femme au foyer. C’est compter sans les absences répétées de Mark, les perpétuelles récriminations des enfants et la mystérieuse épidémie qui frappe les États-Unis, lui donnant des allures de pays en état de guerre. Tandis que les événements s’accélèrent autour d’elle, l’existence de Jiselle prend un tour dramatique, l’obligeant à puiser dans ses ressources pour affronter cette situation inédite..."

Une histoire de conte de fée  : une jolie hôtesse de l'air qui épouse le séduisant commandant de bord.
Et dans les 2 premières pages un fait inattendu : la mort de Britney Spears...
Mais où va nous emmener ce livre???

La vie de Jiselle va se transformer du jour au lendemain. en épousant Mark. Elle devient à la fois femme, belle-mère et mère au foyer. Pas facile de prendre ses repères dans cette nouvelle vie lorsque son mari est plus souvent absent qu'à la maison. Il n'est pas là pour la soutenir dans ses relations avec les deux ados, Sara et Camilla. Si l'une semble faussement indifférente, l'autre est très clairement hostile. 
Malgré tout, Jiselle s'accroche, notamment grâce au petit Sam dont elle acquière rapidement la confiance. 
Tout ceci pourrait paraître banal si il n'y avait cette grippe de Phoenix qui ravage les Etats-Unis et les force à un retour en arrière brutal.
Jiselle va tenir la maison, la famille, pour leur faire traverser cette épreuve. 
Le lecteur est embarqué par la précision de Laura Kasischke pour décrire les situations mais surtout les sentiments de ses personnages.
La tension monte doucement. On se demande un peu où nous allons mais le style est agréable et on se laisse guider par l'auteur qui fait évoluer tranquillement personnage et histoire de fond.