jeudi 23 août 2012

"Visa pour Shangaï" de Qiu Xiaolong

"Washington doit ramener la femme d'un passeur chinois, condition exigée par ce dernier pour qu'il témoigne dans un procès contre l'immigration clandestine. Pékin veut sauver la face et le camarade inspecteur Chen, appelé à l'aide par le Parti, doit servir d'interprète et de guide a Catherine Rohn, l'inspectrice américaine envoyée sur place. Mais voilà, la femme du passeur disparaît, et Chen n'entend pas non plus lâcher une affaire en cours pour les beaux yeux du FBI..."

 Mon premier est une enquête que l'inspecteur Chen mène d'une main de maître.
Mon deuxième est une plongée dans la Chine des années 90 et dans son histoire : révolution culturelle, envoi des jeunes instruis à la campagne, et nouvelles évolutions de la société.
Mon troisième est l'écriture agréable et poétique de Qiu Xiaolong.

Mon tout est un très agréable moment de lecture saupoudré de proverbes chinois.

"Un homme est prêt à sacrifier sa vie pour celui qui l'apprécie, et une femme se fait belle pour celui qui l'apprécie."
"La vie est comme l'empreinte laissée par une grue solitaire dans la neige. On la voit un instant, puis elle disparaît."
"Une longue nuit donne le temps de faire beaucoup de rêves."

"La lettre de Conrad" de Fred Uhlman

"Parce qu'il a participé à un complot contre Hitler, Conrad est condamné à mort. À la veille de son exécution, il décide d'écrire une longue lettre à l'ami juif qu'il se reproche d'avoir trahi."

 Suite de L'ami retrouvé, La lettre de Conrad est un court récit sous forme de lettre écrite par Conrad pour Hans, son ami d'enfance. Conrad est un jeune aristocrate allemand, Hans est juif. Malgré une amitié très importante pour l'un et l'autre, la guerre aura raison de leur relation.
La lettre de Conrad montre comment la jeunesse allemande s'est laissée embrigader dans le nazisme.
L'image de la mère à une place très importante dans ce récit et finalement, Conrad n'a agit que par besoin d'amour maternel et de reconnaissance.

" Pourriez-vous cesser s'il vous plait d'appeler mon ami le "petit Moïse". Cela me blesse énormément. Je vous en prie, essayez de comprendre que c'est mon ami, Juif ou pas."

"L'axe du loup" de Sylvain Tesson

"Sylvain Tesson a refait le long voyage de la Sibérie au golfe du Bengale qu'effectuaient naguère les évadés du goulag. Pour rendre hommage à ceux dont la soif de liberté a triomphé des obstacles les plus grands, seul, il a franchi les taïgas, la steppe mongole, le désert de Gobi, les Hauts Plateaux tibétains, la chaîne himalayenne, la forêt humide jusqu'à la montagne de Darjeeling. A pied, à cheval, à vélo, sur six mille kilomètres, il a connu le froid, la faim, la solitude extrême. La splendeur de la haute Asie l'a récompensé, comme les mots d'une ancienne déportée : "On a le droit de se souvenir.""

 Sylvain Tesson est écrivain et journaliste, mais aussi globe-trotteur. Il met son art de l'écriture au profit de ses longs voyages à travers le monde.
L'axe du loup l'emmène de la Sibérie à l'Inde sur les pas des évadés du Goulag. Au delà du voyage, Sylvain Tesson nous documente beaucoup sur l'histoire des pays traversés. 

C'est un voyage incroyable où il a pu apprécier la beauté de nombreux paysages là où bien d'autres avant lui sont passés en quête de liberté.
 "La force de l'évadé tient dans le fait qu'il n'a rien à perdre et que chaque pas le rapproche de la mort ou de la délivrance, ce qui signifie, dans les deux cas, d'une situation préférable à l'enfer qu'il laisse derrière lui."

 Le style est parfois un peu compliqué. J'avais déjà lu "On a roulé sur la Terre", récit de son voyage avec Alexandre Poussin et j'avais bien plus facilement accroché le récit.

jeudi 16 août 2012

"Tendez-nous la main" de Abdel Belmokadem

« Avec ce livre, je veux montrer qu’on peut renoncer à la fatalité, ne pas vivre sa différence comme une injustice, mais comme une force et un point d’appui. J’ai eu la chance de rencontrer sur ma route des personnes d’autres milieux sociaux, qui ont cru en moi et m’ont aidé à grandir. Mon histoire est la démonstration que tout est possible, à condition de le vouloir et d’oser faire un pas vers l’autre. Ce livre est un message d’espoir mais aussi une alerte : aujourd’hui, les quartiers sont étrangement calmes. Jamais la situation des jeunes n’y a été aussi dure. Il est urgent de leur tendre la main. »

 J'ai reçu ce livre, avec un peu de retard, dans le cadre de Masse Critique du mois de mai sur Babelio. Je l'ai terminé juste avant l'annonce de la création des "zones de sécurité prioritaires" et du déclenchement des émeutes d'Amiens... Un livre plus que d'actualité donc...

 Abdel Belmokadem est né et a grandit à Vaux-en-Velin, dans la banlieue lyonnaise. Très vite il cherche à se démarquer des autres et grâce à sa rage de vaincre, il progresse dans le monde de la boxe, ce qui lui permet de sortir un peu de son quartier.
Le jour où il devient enfin boxeur professionnel, il décide de tout arrêter. Il galère d'un boulot à un autre quand se déclenchent les émeutes de 1990. Avec quelques potes, il sillonne le quartier et tente de faire revenir le calme. La mairie du Vaux-en-Velin lui offre, en 1993, le premier poste de médiateur. 
Après plusieurs années sur ce poste, il crée sa propre entreprise "nes&cité", qui vient en aide aux jeunes des quartiers dans toutes les zones urbaines sensibles. Il met sa démarche et son expérience au service des Communes ou des entreprises qui le sollicitent.

Le constat d'Abdel Belmokadem est celui-ci :
"Le fait de grandir à l'intérieur d'un quartier pendant quinze ou vingt ans crée des cloisonnement dans la tête. Du coup, quand tu as vingt ans et que tu dois aller à la mission locale ou au Pôle Emploi, qui se trouve dans le centre-ville, à cinq minutes en bus, c'est un expédition. En plus c'est un territoire que tu ne connais pas, dont tu ne maîtrise pas les codes. Mentalement, ça suffit pour faire barrage."

 Pour lui, le solution ne viendra pas d'un renforcement policier mais bien d'un accompagnement des jeunes, parfois individuellement, vers l'emploi.
Adepte de jeux d'échec, il avance ses pions un à un dans les quartiers grâce au sport, à l'emploi et aux différents médiateurs qu'il forme. Sa connaissance de la vie de quartier et du fonctionnement des groupes lui permet d'isoler les "suiveurs" pour les réinsérer et ensuite approcher les leaders.
Il amène les jeunes vers l'emploi mais sans leur fournir clé en main. Il facilite les rencontres avec les entreprises grâce à ses opérations "Jobs et cité" mais il ne peut pas passer l'entretien à leur place, à eux de savoir se vendre. Il les entraîne parfois comme pour un match de boxe.
"Si ça n'a pas marché, si t'es pas content, c'est qu'il y a un problème. Il faut l'identifier. Pour une partie, le problème vient peut-être de nous, mais pour une autre, il vient sans doute de toi. Sur notre partie, je veux bien qu'on regarde, mais sur la tienne, j'aimerais aussi qu'on en parle. Tu n'y arriveras que si tu te poses la question."

Chef d'entreprise, élu municipal, il reste surtout un homme de terrain qui va vers les jeunes, vers les élus et les entreprises, pour créer du lien et faire tomber les préjugés.
Vu le contexte des derniers jours, ce livre devrait être mis entre les mains de tous nos dirigeants nationaux et locaux. Pour ma part, je vais le laisser trainer un peu sur mon bureau à la mairie!

"Si je tends la main aux jeunes des quartiers, c'est parce que beaucoup l'ont fait avec moi. De Philippe Oddou à Saïd, tous m'ont éduqué, dans le bon sens du terme : ils m'ont passé le témoin. Moi, je tends la main à quelqu'un d'autre, je lui passe le témoin, et si on fait ça de main en main, de quartier en quartier, de génération en génération, on finira par gagner la partie."

Merci à Babelio, aux éditions Anne Carrière et à nes & cité.
Merci à Abdel Belmokadem de partager son expérience.

mercredi 15 août 2012

Mes lectures des vacances!

Pour mes vacances, je voulais emmener dans mes valises, des livres pour rire. Besoin de décompresser!
 D'où mon premier choix :

 "L'accro du shopping attend un bébé" de Sophie Kinsella.
" L'accro du shopping a le plaisir de vous annoncer la naissance de...
Becky est aux anges ! Dans quelques mois, elle donnera naissance au plus adorable, au plus magnifique, au plus looké des bébés.

D'ici là, elle s'évertue à mettre en pratique sa toute nouvelle théorie : le shopping soignerait les nausées matinales.
Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si notre accro ne s'était pas mise en tête d'être suivie par l'accoucheuse des stars, la sublime Venetia Carter... qui n'est autre que l'ex-petite amie de son mari, Luke ! Et qui semble bien décidée à le redevenir...
Entre les deux femmes, la guerre est déclarée. La pauvre Becky survivra-t-elle aux humiliations de la vénéneuse Venetia ? Quand la situation semble désespérée, notre fashionista a plus d'un tour dans ses sacs !
"

 C'est léger, c'est frais et c'est rigolo!! Voilà de quoi passer un bon moment de détente...rien de mieux pour démarrer les vacances et enfin déconnecter son esprit du boulot et de la maison.
Installez vous tranquillement sur votre chaise longue et laissez vous emporter par la tornade Becky.
Pas besoin d'avoir lu les autres avant, on comprend tout de suite le personnage!
 

En arrivant à l'accueil de la bibliothèque, des petits paquets surprises attendaient les audacieux...j'en ai choisi un, titré "rire", et voici ce que j'ai découvert!

"Dieu est un pote à moi" de Cyril Massarotto.

"L'un a une barbe de quelques jours, l'autre de millions d'années.
L'un vit sur terre, l'autre dans les nuages.
L'un est vendeur dans un sex-shop, l'autre a un métier qui réclame le don d'ubiquité.
L'un n'a pas beaucoup d'amis, l'autre aimerait parfois se faire oublier d'eux...
Vous ne voyez toujours pas de qui il s'agit ?
Et si Dieu avait décidé de faire de vous son meilleur ami ?
"

 Pas de suspens dans ce livre, on voit tout de suite où cela va nous mener mais Cyril Massarotto le fait avec beaucoup d'humour et de subtilité. Les passages plus difficiles sont habillement amenés, sans faire dans le patos. 
Je n'ai pas été gênée par le côté religieux. L'auteur ne fait pas de propagande, il donne son point de vue sur Dieu et nous laisse adhérer ou non.
Un livre qui ne peut pas laisser indifférent et qui pousse forcément à la réflexion.

" Il y a des questions auxquelles on ne peut pas répondre. Et tu sais pourquoi? Parce qu’il ne faut tout simplement pas se les poser, dans la mesure où elles n’ont aucun sens. C’est la même chose pour toi. Tu trouves étrange d’être heureux de ce que tu as, de ne pas vouloir plus, et tu te demandes si c’est normal? Est-ce que tu te rends compte du saugrenu de ta réflexion? Ce que je veux te faire comprendre, c’est qu’il faut juste vivre, prendre les choses comme elles viennent. Le bonheur n’est pas un projet. Sois-en bien conscient. Vis, et ne t’encombre pas l’esprit de questions inutile."

"La Douce Empoisonneuse" de Arto Paasilinna.
Linnea, la veuve du colonel Ravaska, mène une existence tranquille dans sa petite métairie, à arroser ses violettes, en compagnie de son chat. Mais ce paisible tableau n'est qu'une façade... tous les mois, la bonne vieille tremble de peur ! En effet, son neveu et ses deux compères viennent la dépouiller de sa pension, jusqu'au jour où il demande à figurer sur son testament...

D'une situation, à priori, désespérée pour cette vieille dame harcelée par son neveu, Paasilinna va créer un vrai jeu burlesque.
On s'amuse à suivre les péripéties de ces personnages tous plus malmenés les uns que les autres.

Un livre à prendre au second degré mais qui nous montre tout de même le côté sombre de la société Finlandaise et notamment de sa jeunesse.

Complètement immoral mais drôle!!

"Aux urnes, les ploucs!" de Charles Williams.
L'oncle Sagamore régale ! C'est qu'il est en campagne électorale. Tout est bon pour être tranquille, y compris d'être élu puisque c'est nécessaire pour magouiller en paix. Créatures de rêve, alcool, promesses... Non content d'avoir rendu fou le shérif du coin, Sagamore va une nouvelle fois marquer de son exceptionnelle patte le comté de Blossom. De mémoire de concitoyens, on n'avait jamais rien vu d'aussi formidable. Tout le pays en a parlé ! Les gens qui se tiraient dessus... Le gouvernement qui menaçait d'envoyer la garde nationale... En fin de compte, ça faisait une telle pagaille que personne ne savait plus qui faisait campagne pour qui, ni pourquoi. Quelle importance ? Une petite arnaque, une pression, un coup bas... Le pays connaît ça. Il l'a prouvé depuis.

Le jeune Billy vit dans la ferme de son oncle Sagamore et s'il ne comprend pas tout des activités de son oncle, il sait que tout n'est pas très honnête vis à vis de la loi. En période électorale, cela peut poser problème, notamment quand les deux candidats à l’élection mise tout sur son arrestation.
C'est un florilège de personnages haut en couleur que Charles Williams nous propose dans ce livre. Impossible de ne pas se prendre à leur jeu. On se met dans la peau du shérif et on tente de démêler les ruses de Sagamore avant lui.
Un bon moment de lecture. Drôle et futé!


La mission des vacances est donc remplie, j'ai beaucoup ri !! 
Merci la bibliothèque!

jeudi 9 août 2012

"Sous la tonnelle" de Hyam Yared

"Pour garder vive la mémoire de sa grand-mère tout juste disparue, la narratrice se réfugie dans son boudoir, où se sont entassés au fil des ans lettres, dessins et carnets. La fantaisie, la liberté et la générosité de la vieille dame qui pendant toute la guerre du Liban a refusé, malgré les objurgations de sa famille, de quitter sa maison et son jardin, situés sur la ligne de démarcation entre Beyrouth Est et Beyrouth Ouest, s’y retrouvent tout entières. Veuve à trente et un ans, cette encore jeune femme, d’origine arménienne, avait décidé de consacrer sa vie aux autres, après avoir juré fidélité à son défunt mari. Pour sa petite-fille, en instance de divorce, déchirée entre sa quête de liberté et son besoin d’amour, elle était à la fois un point d’ancrage et un modèle inatteignable. Au fil du roman va pourtant apparaître, derrière la figure idéalisée, une femme plus complexe et plus mystérieuse aussi. S’arrachant à son isolement, la narratrice finit par rejoindre dans le salon les visiteurs venus présenter leurs condoléances, ceux qu’elle appelle les « corbeaux ». Elle y croise un inconnu, dépité d’être arrivé trop tard pour remettre à l’occupante des lieux l’épais dossier qu’il lui destinait. Pendant une longue conversation sous la tonnelle, la narratrice médusée va découvrir tout un pan caché de l’existence de sa lumineuse grand-mère."

 Un roman comme je les aime. Hyam Yared nous parle de sa grand-mère, nous promène dans le Liban des années 30 à nos jours, tout en restant ouverte sur le reste du monde et les grands évènements de cette période.
 Dans un style simple, chargé d'émotions, elle nous présente cette femme qui a tant compté pour elle. Une femme qui a voulu résister à la guerre et rester neutre dans tous les conflits. On ressent son attachement, son respect pour elle. 
Avec l'arrivée d'Eugène, elle va découvrir un nouveau visage de sa grand-mère, une histoire qu'elle a gardé pour elle seule : son amitié amoureuse avec Youssef, son exigence envers elle-même et sa fidélité à son premier amour.

Un magnifique portrait de femme. 
Un bel hommage à un petit pays bousculé tout au long de l'Histoire.
Une œuvre poétique.

J'ai beaucoup aimé l'écriture de Hyam Yared. On ressent ses sentiments et on s'attache aux personnages. J'avais l'impression d'être assise avec elle sous la tonnelle du jardin de sa grand-mère.

"Beyrouth Est. Beyrouth Ouest. Ta maison juste au milieu. Dans une zone fantôme désertée par les habitants."

"Druzes, maronites, juifs, chiites, sunnites, avaient tous trouvé refuge dans les monts de ce pays aussi généreux que les hanches d'Irina. Malgré toutes les bêtises et les manipulations de l'Histoire, ce pays avait toujours tenu sur ses pieds et sa pluralité."

"Le cœur ne se dit pas, il se chuchote, sans presque de voix, disais-tu. C'est un murmure de lèvres d'où aucun son ne sort et où tout est possible."

"Au fond de l'oeil du chat" de Serge Quadruppani

"Paul est tué au moment où il devait rencontrer son fils de vingt ans qu'il n'avait jamais connu. Michel, quinquagénaire chômeur et rêveur, ironique et doux, n'avait que deux points d'amarrage dans la vie : Paul, son ami d'enfance, et Jupon, sa chatte bien-aimée. Et ces points d'ancrage disparus, tandis que des flics tueurs tentent de l'éliminer, que d'autres flics, dont un colosse homosexuel et une capitaine dont il est amoureux, tentent de le sauver, Michel commence à dériver..."           

Voici un petit polar qui ne paie pas de mine mais qui permet de passer un bon moment. Pas de grande nouveauté dans l'écriture et l'intrigue mais le tout se tient donc on se prend au jeu.

Le récit alterne entre deux personnages :
- Michel, quinquagénaire à la dérive, se retrouve tour à tour, suspect, inspecteur et héros.
- Emile, ancien agent des guerres secrètes, nous emmène dans ses occupations macabres.
Les animaux, les chats en particuliers, ont bien sûr leur place dans ce récit.

Serge Quadruppani encre l'intrigue dans des faits réels et actuels. Il n'hésite pas à pointer du doigt le fonctionnement de certains services de l'Etat.

"Au moment du coucher, même Manga, le seul être vivant que je laisse accéder à l'étage, n'a pas le droit de franchir le seuil de ma chambre.
Je ne me déshabille jamais sous le regard des chats.

Ce qu'il y a dans l'oeil de ces animaux de compagnie, de ces félins entrés en douce dans la vie des humains voilà quelques millénaires, je ne l'ai jamais vu ailleurs."