mercredi 14 mars 2012

"Un heureux événement" de Eliette Abécassis

" Désormais ma vie ne m'appartenait plus. Je n'étais plus qu'un creux, un vide, un néant. Désormais, j'étais mère. "
E. A.

"Violent, sincère, impudique, le nouveau roman d'Eliette Abécassis brise les tabous sur la maternité, cet " heureux événement " qui n'est peut-être qu'une idéologie fabriquée de toutes pièces. Après Mon père et Clandestin, la romancière affirme un ton toujours plus personnel, où la fiction se mêle à une analyse subversive de la société."

 La bande annonce du film m'a attirée mais comme toujours avant de voir le film, je préfère lire le livre... J'ai regardé les critiques à droite à gauche et mon envie en a pris un coup...on peut dire que ce livre est loin de faire l'unanimité! J'ai fini par me lancer avec un peu d'appréhension!

Bilan à chaud : ce n'est pas si terrible que ça!!
Certes Eliette Abécassis ne prend pas de pincettes et il vaut mieux avoir déjà fait des enfants avant de la lire, sinon on risque de ne jamais en faire... Mais, elle a le courage de dire, sans tabou, que la grossesse n'est pas toujours un état de plénitude absolue et que l'arrivée d'un enfant n'est pas si facile à vivre que ça.

Il y a la grossesse et la transformation du corps qu'il faut savoir accepter.
Il y a la rencontre avec ce petit être et la découverte de cette dépendance "à vie". Eliette Abecassis déculpabilise les femmes pour qui l'instinct maternel n'est pas une évidence...
"Pourtant j'étais attachée à elle [...], ma petite : un lien solide s'était tissé entre nous. Cela n'avait rien à voir avec la passion amoureuse. C'était quelque chose de viscéral et d'évident, de naturel et d'originel. Quelque chose d'organique et d'indéracinable. Peut-être était-ce cela, l'amour ?"

Mais ce qui m'a surtout marquée c'est la relation homme/femme. Je pensais ce livre centré sur la relation mère/enfant mais je ne m'attendais pas à ce volet "couple" qui bien évidemment est intimement lié...
Ce qui arrive à ce couple en 10 mois m'a fait l'effet d'un film en accéléré de ce qui arrive à de nombreux couples en 10-15 ou 20 ans. On peut choisir la solution radicale de se séparer au bout de 10 mois quand on n'arrive pas à se retrouver, comme on peut s'accrocher pendant plusieurs années pour finir par craquer lorsque les enfants ont grandi... 
10 mois ou 20 ans, le couple doit s'accrocher face aux doutes, aux peurs et aux tourments qui accompagnent l'éducation d'un enfant.

"L'amour au début est ardent et passionnel, schizophrène et maniaco-dépressif comme le bébé, puis il grandit et il devient mûr, solide, réfléchi, il se pose, il s'élève alors, mais nous ne le savons pas, nous disons tout simplement qu'il cesse."

L'écriture est particulière, assez impersonnelle pour un sujet si personnel, et ne m'a pas permis de me sentir proche de Barbara. Je n'adhère pas à tout ce qu'elle dit mais je pense que de nombreuses femmes, plus qu'on ne le pense, sont confrontées à cette dépression après l'accouchement. Mais dans notre société, elles n'ont pas beaucoup de place pour s'exprimer. Il ne fait pas bon dire que l'on est malheureuse après cet "heureux événement"...
 Il est important d'en parler mais je ne suis pas sûre que ce livre puisse aider une femme traversant cette crise...il n'y a pas de solution, juste le partage d'un vécu...

vendredi 9 mars 2012

"Dans la mer il y a des crocodiles : l’histoire vraie d’Enaiatollah Akbari" par Fabio Geda

"Dix ans, ou peut-être onze. Enaiat ne connaît pas son âge, mais il sait déjà qu’il est condamné à mort. Être né hazara, une ethnie haïe en Afghanistan par les Pachtounes et les talibans, est son seul crime. Pour le protéger, sa mère l’abandonne de l’autre côté de la frontière, au Pakistan. Commence alors pour ce bonhomme «pas plus haut qu’une chèvre» un périple de cinq ans pour rejoindre l’Italie en passant par l’Iran, la Turquie et la Grèce. Louer ses services contre un bol de soupe, passer les frontières dissimulé dans le double-fond d’un camion, braver la mer en canot pneumatique, voilà son quotidien. Un quotidien où la débrouille le dispute à la peur, l’entraide à la brutalité. Mais comme tous ceux qui témoignent de l’insoutenable, c’est sans amertume, avec une tranquille objectivité et pas mal d’ironie, qu’il raconte les étapes de ce voyage insensé."

Enaiatollah Akbari nous raconte 5 ans de sa vie, 5 années de voyage, de peur, de souffrances mais aussi d'amitié et finalement le soulagement de l'arrivée, le début d'une nouvelle vie.

Le récit d'Enaiat est entrecoupé de petits dialogues entre lui et Fabio Geda où l'on sent la confiance qui s'est instaurée entre eux.
Fabio Geda n'a pas cherché à romancer le récit d'Enaiat. Il le raconte brut, avec ses mots, et respecte ses choix notamment lorsqu'Enaiat ne souhaite pas s'attarder sur des descriptions car pour lui "les faits sont importants. L'histoire est importante. Ce qui change ta vie, c'est ce qui t'arrive, pas les lieux ni les gens".

Ce livre ne peut pas laisser indifférent. Le courage et l'envie de vivre de ce petit garçon, malgré l'abandon et les dangers, forcent au respect.
"Il faut toujours avoir un désir devant soi, comme une carotte devant un âne, parce que c'est en essayant de satisfaire ses désirs qu'on trouve la force de se relever, il faut toujours avoir un rêve au-dessus de la tête, quel qu'il soit, alors, la vie vaudra la peine d'être vécue."

Un beau témoignage.

Entretien avec Enaiat et Fabio Geda sur le site des éditions Liana Levi.

Le parcours d'Enaiat :

"Le bonhomme de neige" de Jo Nesbo

"Les premiers flocons ont quelque chose de féerique. Ils rapprochent les couples dans la chaleur des veillées, étouffent les bruits, étirent les ombres et masquent les traces. Dans le jardin familial des Becker, un bonhomme de neige fait irruption, comme sorti de nulle part, sorte de croquemitaine blanc, ses grands yeux noirs braqués sur les fenêtres du salon. Le lendemain matin, la mère a disparu, ne laissant qu'une écharpe rose entourée au cou du bonhomme de neige... Trop de femmes en Norvège, depuis des années, n'ont plus donné signe de vie dès la première neige. Harry Hole reçoit une lettre qui lui annonce d'autres victimes. D'une sobriété étonnante, l'inspecteur va se retrouver confronté, pour la première fois de sa carrière, à un tueur en série agissant sur son territoire. L'enquête le conduira jusqu'au gouffre de la folie."

D'un coup, la bibliothèque de ma Commune a acheté tous les livres de Jo Nesbo...Ne le connaissant pas, je me suis laissée tenter! En grande amatrice de polars, je ne suis pas déçue par cet auteur norvégien.

L'enquête avance sur un rythme tranquille mais qui ne traine pas en longueur. 
Le thème et les meurtres sont assez originaux. 
Le personnage de l'enquêteur principal Harry Hole est, comme bien souvent, assez charismatique : un peu perdu entre son ex-petite amie et une bouteille d'alcool trop tentante.

Bref, un bon polar où tous les éléments sont réunis pour  nous emmener au fil de l'enquête jusqu'au dénouement final...que l'on voit un peu venir quand même!

J'ai passé un bon moment mais pour autant, Jo Nesbo ne propose rien de nouveau.

"Le champ de personne" de Daniel Picouly

"Le Mohican, onzième d'une famille de treize enfants, vit dans un petit pavillon de banlieue. Sa famille, grande tribu généreuse, est solidaire et la vie n'est jamais monotone pour le Mohican, entre le football (sa grande passion) et les dictées (sa terreur), entre rêves et rires. Le champ de personne est la chronique d'une journée comme les autres..."


Une histoire de famille racontée par un enfant de 10 ans, avec son propre langage.
Picouly nous emmène à travers les joies, les difficultés et les aventures de cette tribu, de son enfance.
Ce livre est un bel hommage à sa famille nombreuse et surtout à sa mère qui l'écoute raconter son récit, et le recadre de temps en temps car il faut bien le dire, il part souvent dans tous les sens!

"J'entends la voix de la m'am au fond de mon oreille. La droite, celle des histoires pour s'endormir. La m'am est toujours à mes côtés. Elle flotte dans les airs, ne dort jamais, vole, apparaît, disparaît, se glisse sous mes paupières, dans la poche de mon short, ou dans mon cartable. J'ai de la chance, j'ai une maman Peter Pan."

Un récit plein de fraicheur malgré les sujets lourds des années 50-60.
Un petit bémol tout de même. Je l'ai trouvé un peu long sur certains épisodes et il est difficile de s'accrocher à ce langage enfantin sur 450 pages...j'étais contente d'arriver au bout!

mardi 6 mars 2012

"L'invention de Hugo Cabret" de Brian Selznick

"Hugo Cabret est orphelin : son père, qui l’élevait, est mort dans l’incendie du musée où il était employé comme horloger. Ses seuls compagnons sont un automate trouvé dans les décombres du musée, sur lequel travaillait son père, et son oncle, un poivrot qui l’héberge dans les combles de la gare. Un jour, l’oncle disparaît. Hugo n’a d’autre solution que de se cacher et de poursuivre le travail de l’oncle (régler les horloges) en priant pour qu’on ne le découvre pas. Car il a un but : finir de réparer l’automate de son père."

 « Ne tournez pas la page trop vite ! Imaginez d'abord que vous êtes assis dans le noir, comme au cinéma avant le début d’un film…….. »

Voilà comment passer un bon moment et engloutir plus de 500 pages en une soirée!!

L'intérêt du livre réside bien sûr dans l'alternance des dessins et du texte. C'est très agréable et facilite la transformation du texte en images pour les enfants. N'ayant pas encore vu le film, je n'ai eu aucun mal à imaginer la mise en scène. Tout est fait pour nous plonger dans l'univers du cinéma.

L'histoire n'a rien à envier aux plus beaux contes pour enfants : le rêve, l'imaginaire, l'amitié et la magie. Tout ceci mêlé à des évènements réels sur l'histoire du cinéma. Les personnages sont attachants et ont tous un petit côté mystérieux.

"Tu sais, dans les machines, il n'y a pas de pièces en trop. Elles ont exactement le nombre et le type de pièces qui leur sont nécessaires. Alors, je me dis que, si l'univers entier est une machine, il y a bien une raison pour que je sois là. Et toi aussi, tu as une raison d'exister."

"Le temps peut vous jouer des tours de toutes sortes.
En un clin d’œil, des bébés apparaissent dans des landaus, des cercueils disparaissent dans la terre, des guerres sont gagnées et perdues, et, tels des papillons, les enfants se métamorphosent en adultes."

Un magnifique livre jeunesse que je recommande aux adultes car il est toujours bon de revivre des aventures d'enfants!
Un beau clin d’œil au cinéma. Pas étonnant que Martin Scorsese s'en soit emparé! Il me reste à voir le film et je garde le livre sous le coude pour mon fils d'ici un ou deux ans!